Sur-pollution des voitures : le Parlement européen met le holà

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La Commission Environnement (ENVI) du Parlement européen se prononçait ce lundi 14 décembre sur le dossier des émissions d’oxydes d’azote des voitures en conditions réelles (RDE pour real driving emissions).

Pour rappel, le 28 octobre, le comité technique sur les véhicules à moteur (TCMV), comité de comitologie[[Le terme «comitologie» concerne l’ensemble des procédures en vertu desquelles la Commission européenne exerce les pouvoirs d’exécution conférés par le législateur européen, assistée des comités de représentants des pays de l’Union européenne (UE). Ces comités de comitologie sont présidés par un représentant de la Commission et donnent un avis sur les actes d’exécution proposés par la Commission : http://eur-lex.europa.eu/summary/glossary/comitology.html?locale=fr et http://ec.europa.eu/transparency/regcomitology/index.cfm?do=FAQ.FAQ&CLX=fr#6]] qui dans lequel siègent des représentants des 28 États membres, décidait d’affaiblir la proposition de la Commission européenne concernant les RDE. Dans son avis, le TCMV décidait que, à partir de 2017, les voitures pourraient émettre 2,1 fois plus en conditions réelles qu’en laboratoire – et 1,5 fois plus à partir de 2020 (http://www.iew.be/spip.php?article7488).

Dans un vote sans appel (40 voix contre 9 et 13 abstentions), la Commission ENVI du Parlement européen s’est prononcée pour le rejet de l’avis du TCMV. Par ce vote responsable, les députés européens démontrent clairement leur souci de préserver la santé humaine prioritairement aux intérêts mercantiles de quelques constructeurs d’automobiles qui, pendant des années, ont enfreint la loi et abusé de la confiance de leurs clients en trichant sur les tests en laboratoires. Ce qui est d’autant plus impardonnable que la technologie de dépollution existe et fonctionne, certains véhicules respectant effectivement les limites légales en conditions réelles (voir à ce sujet l’audition d’IEW à La Chambre : http://www.iew.be/spip.php?article7535).

Les députés européens ont également, par leur vote, sanctionné un avis illégal. En effet, l’article 290 du traité de Lisbonne est sans équivoque : « Un acte législatif peut déléguer à la Commission le pouvoir d’adopter des actes non législatifs de portée générale qui complètent ou modifient certains éléments non essentiels de l’acte législatif » comme le rappelle Client Earth dans une analyse juridique menée pour le compte de la Fédération européenne Transport and Environment (T&E). Or, multiplier par deux les limites d’émissions est tout sauf non essentiel…

Le vote de la Commission ENVI devra encore être confirmé en séance plénière du Parlement européen en janvier ou février 2016.

Une autre échéance importante aura lieu ce mercredi 16 décembre, avec l’examen de l’avis du TCMV par le Conseil Environnement européen. Les ministres des 28 Etats membres auront la lourde tâche de rejeter ou entériner l’avis rendu par leurs représentants qui siègent au sein du TCMV. Le rejet n’est pas gagné : pour le moment, seuls la Belgique, le Danemark, l’Irlande et les Pays-Bas ont manifesté leur soutien à la proposition de la Commission européenne. Toutefois, on comprend mal comment le Conseil pourrait camper sur une position qui ne peut s’expliquer que par la volonté de permettre à certains constructeurs d’automobiles de continuer à tricher (mais en toute légalité cette fois), une position qui fait fi de la santé humaine (les oxydes d’azote sont responsables de 72.000 décès annuels en Europe). Puissent les Ministres européens, dans un sursaut moral, retrouver le sens des priorités et du bien public.