Le droit à un environnement sain n’a plus de frontières

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Depuis 1997, la Convention d’Espoo oblige ses pays signataires à intégrer l’avis du (des) pays voisin(s) lorsqu’un un projet frontalier de grande ampleur est à l’étude. Le texte permet donc de s’affranchir du cadre des frontières strictement nationales et, in fine, de mieux protéger l’environnement. C’est en vertu de cette Convention d’Espoo que la population de trois communes belges a pu se faire entendre et qu’un projet de carrière en territoire français a été enterré.

Un groupe français avait pour projet d’ouvrir une énième carrière dans la région de Maubeuge, à Bousignies-sur-Roc. Située le long de la frontière franco-belge, cette implantation était porteuse d’incidences catastrophiques sur l’environnement et le quotidien de centaines d’habitants des deux pays. carrieregoogle.jpgLe site prévu pour l’extraction cumulait en effet les points faibles : situé à 700 mètres à peine de Montignies-Saint-Christophe, village belge de l’entité d’Erquelinnes ; bordé par une rivière, La Hante, qui traversait ensuite le village ; planté au c½ur du Parc naturel régional de l’Avesnois ; jouxté par un site Natura 2000… Sans compter que l’activité et ses multiples implications allaient porter gravement atteinte au caractère rural préservé de la région.

La mobilisation citoyenne, des deux côtés de la frontière, fut à la hauteur des enjeux, ce qui était en train d’amener les autorités françaises à durcir les conditions assorties à l’autorisation d’exploiter Dans ce contexte, le projet perdait de son intérêt économique pour le carrier, le groupe Dhordain, qui, le 8 décembre 2009, abandonna ses démarches d’obtention de l’autorisation, avant même l’annonce de la décision de la préfecture du Nord. Il ne s’agissait pas là d’une réorientation stratégique d’une entreprise privée mais bien du résultat d’une mobilisation citoyenne ayant amené dans la balance des éléments décisifs.

respectcitoyen.jpgLa particularité de cette victoire citoyenne réside dans la prise en compte des réclamations de la population d’un pays tiers. Les autorités françaises ayant considéré ce projet comme susceptible de générer des incidences non négligeables, tant côté français que côté belge, elles ont demandé à la Région Wallonne de lui fournir un avis. Conformément aux procédures légales appliquées en Wallonie en matière d’environnement, une enquête publique a été organisée du 6 juillet au 11 septembre 2009 dans les communes d’Erquelinnes, Beaumont et Merbes-le-Château. Et l’administration française a intégré dans son instruction du dossier les réclamations de la population des communes belges voisines.

La gestion de ce dossier par la France constitue une illustration parfaite de l’application de la « Convention sur l’évaluation de l’impact sur l’environnement dans un contexte transfrontière », dite Convention d’Espoo. Entrée en vigueur en 1997, celle-ci oblige les Etats signataires à consulter les pays voisins sur tout projet majeur susceptible d’avoir un impact transfrontière préjudiciable à l’environnement. L’adoption de cette convention a considérablement changé la donne en matière d’aménagement dans les zones frontalières. Avant 1997, il aurait été beaucoup moins aisé pour les populations belges de se faire entendre face à un tel projet carrier.

Mais si la convention d’Espoo a valeur légale, elle n’en demeure pas moins un outil de droit international : malgré l’existence de juridictions pouvant sanctionner les manquements, sa mise en ½uvre reste essentiellement liée au bon vouloir des autorités nationales… Dans ce contexte, une veille citoyenne est plus que jamais nécessaire. Les habitants des communes belges concernées par ce projet de carrière ont ainsi certainement joué un rôle majeur dans le démarrage des procédures. C’est certainement grâce à cette vigilance que la Convention d’Espoo pourra porter pleinement ses effets et que les espaces frontaliers cesseront d’être considérés comme des lieux poubelles où on peut développer des projets que personne ne veut ailleurs.

Extrait de nIEWs (n° 71, du 11 au 25 mars),

la Lettre d’information de la Fédération.

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