Elevage intensif : un secteur à surveiller !

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La législation relative aux élevages vient d’être révisée par le gouvernement [ [22 décembre 2005. – Arrêté du Gouvernement wallon modifiant l’arrêté du Gouvernement wallon du 4 juillet 2002 arrêtant la liste des projets soumis à étude d’incidences et des installations et activités classées, pour ce qui concerne les rubriques 01.20 à 01.49.03
]]. Les principes de cette modification sont d’une part de consacrer la zone agricole à sa vocation productive et d’autre part de ne plus prendre en compte comme critère de seuils que la question des nuisances aux tiers (odeurs, bruits…). Le gouvernement estime en effet que les législations environnementales encadrent déjà suffisamment l’activité d’élevage.

Pour bien apprécier l’impact de ces modifications, il s’agit de distinguer :
• l’élevage des herbivores, naturellement lié au sol et dont le développement est en quelque sorte ‘’cadenassé’’ par la présence de quotas de production,

• les élevages ‘’non herbivores’’ (porcs, volailles et veaux) dont la production peut être très intensive puisqu’elle ne nécessite aucun lien au sol et est soumise pour son développement aux seules contraintes socio-économiques. Le risque est grand, si le secteur devenait porteur, de voir le nombre de ces élevages intensifs exploser. 

Pour l’élevage des herbivores, les seuils ont été largement assouplis. Ils permettront à de nombreuses exploitations de passer par une simple déclaration plutôt que par un permis (voir conséquences plus loin). Cet assouplissement est plus fort encore en zone agricole où la classe 2 est supprimée au profit de la classe 3.
Pour les élevages « non herbivores », les seuils restent pratiquement inchangés en zone d’habitat et à moins de 300 mètres des lieux habités, excepté ceux situés en zone agricole. La protection du cadre de vie des riverains est donc partiellement assurée. Mais au-delà de ces 300 mètres, en zone agricole, les seuils sont très fortement assouplis pour la classe 3, ce qui permettra à des élevages intensifs de se développer en passant par une simple déclaration.

Une simple déclaration et…

Finis donc l’enquête publique et les avis des administrations de l’environnement qui permettaient d’apprécier, en amont même d’un projet, les menaces qu’il est susceptible de faire peser sur l’environnement! Une dérive qui risque bien de porter préjudice aux territoires les plus délicats au niveau environnemental, comme les sites Natura 2000 de très haute valeur biologique ou les captages situés dans des zones sensibles. Dérive contre laquelle l’autorité communale ne pourra rien faire vu que les déclarations ne peuvent être refusées ni même soumises à des conditions particulières… Ceci est d’autant plus inquiétant que certaines parties du territoire, dont les nappes sont polluées par les nitrates agricoles, sont déjà saturées par les effluents d’élevage.

Ce projet prive le gouvernement et les autorités communales de la possibilité de refuser de nouveaux projets dans ces zones excédentaires ! Le gouvernement s’empêche donc de… gouverner !

Parallèlement à la révision de cet arrêté, le gouvernement a établi les conditions intégrales et/ou sectorielles [ [http://wallex.wallonie.be/ ]] encadrant ces activités d’élevage. Celles-ci se limitent essentiellement à répéter les obligations légales qui sont imposées par ailleurs. Une exception : elles imposent une distance minimale d’implantation pour les nouveaux bâtiments d’élevage à proximité des habitations de tiers. 

Ces modifications vont probablement faciliter le développement d’élevages intensifs, non pas dans des régions où sont produits les aliments dont ces élevages ont besoin mais bien dans celles où l’on pourra valoriser des surfaces d’épandages… Et ce, bien sûr, au grand dam de l’environnement et des riverains.

Enfin, à défaut du permis d’environnement, pourra-t-on espérer la réalisation d’un cadastre des épandages qui puisse prendre en compte les spécificités locales afin de protéger les ressources en eaux souterraines et de surface ainsi que la biodiversité ? L’évolution du programme de gestion durable de l’azote, remis en causes par la cour de justice européenne ne le laisse pas préjuger.

Toujours est-il que les associations resteront attentives à l’évolution du secteur afin d’éviter que les effets cumulés de multiples projets ne causent trop de préjudices à l’environnement.

Lionel Delvaux

Anciennement: Nature & Ruralité