Contournement de Couvin et liaison Couvin-Brûly – Lettre ouverte au Ministre André Antoine concernant la demande de permis d’urbanisme

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Monsieur le Ministre,

Le 30 juin dernier avait lieu la réunion de concertation consécutive à l’enquête publique concernant la demande de permis d’urbanisme pour la construction d’une route contournant Couvin et reliant Couvin à Brûly.

Il nous tenait à c½ur, dans le cadre de l’instruction de ce dossier, de porter à votre attention certains éléments du dossier qui nous semblent être de nature à justifier un report de la décision d’octroyer le permis.

Il convient tout d’abord de relever que la procédure est potentiellement entachée d’irrégularités. L’administration de l’Urbanisme avait identifié des lacunes dans l’étude d’incidences sur l’environnement soumise à enquête publique en 2001 et demandé au MET de compléter sa demande de permis d’urbanisme en conséquence. L’étude complémentaire (dont l’enquête publique vient de se clôturer) a, comme l’EIE de 2001, reçu des avis défavorables du CWEDD et de la CRAT. Cette dernière considère que l’étude complémentaire ne constitue qu’un recueil de « compléments d’informations techniques » et que, dès lors, « 9 des 14 km de la liaison Couvin-Brûly n’ont pas fait l’objet d’une étude d’incidences »[[Avis relatif à l’étude d’incidences complémentaire sur l’environnement du contournement de Couvin et de la liaison Couvin-Brûly (RN5), CRAT, 12 avril 2005]]

De plus, le CWEDD et la CRAT ont tous deux jugés que l’étude complémentaire ne constituait pas un dossier propre à passer tel quel en enquête publique.

  • « Dès lors, ce document n’est pas présentable pour une enquête publique, à moins d’être accompagné des plans de la demande de permis et de l’étude d’incidences réalisée en 2001 »[[Avis – Demande de permis d’urbanisme pour la construction d’une route contournant Couvin et reliant Couvin à Brûly – Etude complémentaire, CWEDD, 11 avril 2005]].
  • « Dès lors, la CRAT rend un avis défavorable tant sur l’étude d’incidences complémentaire que sur la demande de permis et est de plus d’avis que la demande de permis ne peut être soumise à enquête publique dans sa forme actuelle »[[CRAT, document cité.]]

Au-delà des questions de procédure et de forme, une analyse rationnelle des aspects « infrastructures de communication » de l’EIE amène à se poser question quant au bien-fondé du projet.

« Les mouvements de voitures sont extrêmement difficiles à appréhender, car ils dépendent des types d’utilisateurs (locaux, de transit, …) et des lieux d’origine et de destination. Il est ainsi impossible de distinguer les gens qui transitent par Couvin de ceux qui y habitent »[[Etude d’incidences sur l’environnement, Contournement de Couvin / Liaison Couvin-Brûly, Rapport final, Aries, février 2001, p. 297]]. L’auteur de l’étude d’incidences met, par ces mots, le doigt sur le paradoxe de ce dossier : il n’existe pas de diagnostic sérieux des problèmes d’encombrement dans Couvin. Seules des enquêtes origine-destination auprès des automobilistes pourraient établir la part du trafic de transit. De telles enquêtes n’ont pas été entreprises.

Selon le CWEDD, la question de l’opportunité de ce contournement doit se poser en fonction des usages qui lui sont destinés. S’agit-il d’un contournement à vocation locale ou d’une route de transit ? « Le projet présenté n’est pas précis sur ces deux options : est-ce la perspective de désenclaver Couvin qui est à l’origine du projet ou la liaison Rotterdam-Marseille ? »[[Avis – Etude d’incidences sur l’envrionnement relative à la demande de permis d’urbanisme pour la construction d’une route contournant Couvin et reliant Couvin à Brûly, CWEDD, 09 avril 2001.]]

Au niveau du trafic local, « il est intéressant de remarquer que l’intensité du trafic sur la N5 au niveau de Brûly représente une faible part (12,5%) de l’intensité de trafic siégeant au nord et dans le centre de Couvin ». De plus, « les camions ne représentent finalement q ‘une faible part de la circulation totale [[Aries, ouvrage cité, p. 147]]. Par ailleurs, l’EIE souligne que les distances gagnées sur les liaisons internationales sont « insignifiantes à l’échelle des trajets »Aries, ouvrage cité, p. 294.

Ces incertitudes au niveau du diagnostic et donc de l’opportunité du projet semblent indiquer que nous ne sommes pas en présence d’une situation dans laquelle des raisons impératives d’intérêt public majeur pourraient justifier les incidences négatives sur les sites d’intérêt biologique traversés.

Nous nous tenons, bien évidemment, à votre disposition pour discuter plus avant des arguments esquissés dans la présente.

Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l’expression de notre haute considération.

Gérard Jadoul, Président d Inter-Environnement Wallonie
Pierre Courbe, Chargé de missions « Mobilité »
Contact: 081/255 260